Kool Shen: "Je demande aux gens de bien lire le programme du FN"

Il a écrit la légende du rap français dans les années 90. Aujourd'hui père et acteur, il livre son troisième album solo, Le fil du rasoir. Apaisé, mais toujours engagé.

Il a longtemps été l'autre moitié de NTM. Kool Shen, alias Bruno Lopes, aujourd'hui acteur et grand joueur de poker, revient aux affaires. Comprenez au rap. Sept ans après son dernier album solo, Kool Shen sort ce vendredi un nouvel album, intitulé Le fil du rasoir.

Ces dernières années, il a passé beaucoup de temps autour des tables de poker, sa dévorante passion du moment, et sur quelques plateaux de cinéma, notamment le tournage du film Réparer les vivants avec Tahar Rahim dont la sortie est prévue cette année. BFMTV l'a rencontré sur le tournage de son clip, dans une école de Seine-Saint-Denis. 

> Le troisième album solo

Après Dernier Round en 2004 et Crise de Conscience en 2009, Kool Shen sort aujourd'hui son troisième album solo. Un album très intime. "Ce que je raconte dans mes albums est toujours très personnel. Ou en tout cas une vision très personnelle sur l'environnement, sur ce qui se passe dehors, sur la société", confie Kool Shen.

"Je fais à peu près le même album à chaque fois. C'est juste le support qui change et l'angle de tir. Mais sur le fond, c'est les mêmes thèmes qui sont abordés. J'aimerais bien en aborder d'autres, si la société allait un peu mieux, peut-être qu'on pourrait parler d'autre chose".

> Le Front national

Le Front national est un des thèmes de ce nouvel album. Dans La France est internationale, on peut ainsi entendre Kool Shen reprendre le célèbre refrain La jeunesse emmerde le Front national chanté en 1989 par le groupe punk Bérurier Noir. "On avait fait un morceau en 1995 sur le Front national (ndlr, Plus jamais ça), à l'époque où Jean-Marie Le Pen faisait, je crois, 8%, se souvient Kool Shen. Je pense qu'on ne s'est pas trop trompés, puisque sept ans après, en 2002, il était au déjà deuxième tour. Ce qui était inimaginable dans les années 80, quand les socialistes sont arrivés au pouvoir. Vingt ans après la situation s'est aggravée pour les gens qui ne font pas partie du Front national".

"A l'époque, les supporteurs du Front national était qualifiés de juste racistes. Aujourd'hui, il y a des gens qui adhèrent au Front national, avec pas forcément des idées racistes, mais plutôt l'idée que Marine Le Pen puisse être la solution à la France. C'est plus problématique. Tout comme le fait que la gauche n'ait pas fait son travail, que la droite non plus et qu'aujourd'hui on dise 'ce ne sera ni droite ni gauche, ce sont des incapables, donc on va tenter le Front national'. Je demande aux gens de bien lire le programme du Front national, qui veut quand même revenir au franc et fermer les frontières. Cette démagogie, pour faire croire que Marine Le Pen est du côté des ouvriers, j'espère que les gens auront les yeux assez ouverts pour ne pas tomber dans ce piège."

> La voix

Le rappeur a dû subir une opération des cordes vocales pour pouvoir continuer à chanter. "Au moment où ça arrive et que tu arrives en studio et que tu chantes à peine une demi-heure et que t'as la voix qui disparaît, tu trouves ça assez étrange. Mais en fait, les toubibs m'ont dit que c'est très très classique chez les chanteurs ou les rappeurs. C'est une petite opération des cordes vocales, c'est un truc bénin. Le seul truc, c'est que tu ne peux pas chanter pendant deux mois après l'opération. Ca a juste retardé un petit peu l'album", évoque-t-il.

> La paternité

Kool Shen est le père attendri d'un jeune garçon de 12 ans, qui participe au clip et se "fout complètement" du glorieux passé de son paternel. "Il voit à peu près, mais il n'écoute pas trop les morceaux. Ca ne l'intéresse pas plus que ça". "Si j'avais eu un gosse quand j'étais en pleine période NTM, avec les tournées, tout ça, ça aurait été plus compliqué. Aujourd'hui c'est plus posé, j'ai plus de temps, je peux passer beaucoup de temps avec lui".

> L'âge

Aujourd'hui quinquagénaire, Kool Shen ne se voit pas arrêter le rap, mais il admet: "C'est peut-être plus difficile de s'adresser à la jeunesse à un certain âge. Mais pour continuer à écrire des textes, il n'y a pas de date limite".

M. R. avec Jean-Marie Marchaut