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Cinéma

Nicolas Bedos revient avec La Belle époque: "J’ai voulu interroger le rapport à la nostalgie"

L'équipe de La Belle époque de Nicolas Bedos à Cannes

L'équipe de La Belle époque de Nicolas Bedos à Cannes - Valery Hache - AFP

Présenté hors compétition à Cannes, le nouveau film de Nicolas Bedos sort ce mercredi 6 novembre. Le réalisateur en raconte les coulisses et lève un coin du voile sur la suite d’OSS 117, qu’il tournera à la fin de l’année.

Deux ans après son premier film en tant que réalisateur, M. & Mme Adelman, Nicolas Bedos revient avec La Belle époque, une fable d'anticipation portée par Daniel Auteuil, Guillaume Canet, Doria Tillier, Fanny Ardant, Pierre Arditi et Denis Podalydès.

Salué lors de sa présentation cannoise en mai dernier, le long-métrage imagine une société où les clients peuvent replonger dans l’époque de leur choix à l’aide d’artifices théâtraux et de reconstitution historique.

Daniel Auteuil, dans son meilleur rôle depuis des années, incarne Victor, un auteur de BD désabusé qui voit sa vie bouleversée le jour où le créateur de cette société, Antoine (Guillaume Canet), lui offre un voyage dans le temps. Victor décide alors de revivre la semaine la plus marquante de sa vie: le 16 mai 1974, le jour où il rencontra le grand amour.

En pleine préparation du troisième volet des aventures d'OSS 117, Alerte rouge en Afrique noire, Nicolas Bedos raconte comment il a conçu son nouveau film, qui devrait se tailler la part du lion aux César en 2020.

La Belle époque interroge notre rapport à la nostalgie, aux écrans, à la fiction. L’intrigue se déroule à la fois dans les années 1970, de nos jours et par moments on peut même avoir l’impression d’être dans le futur. Comment est née cette idée?

Du désarroi de certains de mes proches face à la révolution numérique actuelle. J’ai voulu interroger le rapport à la nostalgie. Au final, c’est en retournant dans le passé que le personnage principal se réconcilie avec le présent.

Pourquoi avez-vous choisi précisément la date du 16 mai 1974? Que signifie-t-elle pour vous?

Parce qu’elle coïncidait avec la jeunesse de mes deux acteurs principaux! [Fanny Ardant et Daniel Auteuil, NDLR] Et aussi parce que c’est une année plutôt riche politiquement et musicalement.

Un personnage dit à propos de la reconstitution du passé: "On dirait du Claude Lelouch". Faisait-il partie de vos références pour ce film? En aviez-vous d’autres?

Oui, c’est un clin d’œil affectueux à un cinéaste qui m’a énormément soutenu quand il a vu mon premier film. Il m’a fait des compliments incroyables qui m’ont encouragé. Et puis c’est aussi une petite ironie sur le côté parfois mélo de certaines de ses séquences. J’adore moi-même le mélo et je m’en méfie.

L’orange, le jaune et le marron dominent le film. Comment avez-vous travaillé avec votre chef opérateur Nicolas Bolduc? Quelles étaient vos inspirations? 

Alors que le scénario est celui d’une comédie, mes références étaient davantage celles des polars. French Connection, Sidney Lumet, Seven de David Fincher. Je voulais que la couleur fasse voyager Victor, mais aussi le spectateur, dans un autre univers.

Le rythme est au début très rapide, avec une caméra à l’épaule, puis il ralentit dès que le personnage de Daniel Auteuil revit les années 1970. Pour quelles raisons?

Le rythme est soutenu au début pour souligner la confusion et l’anxiété du personnage principal. Victor est dépassé par la vitesse de notre époque et au début, je souhaitais que le spectateur le soit aussi. D’où ce tremblement de l’image. Puis quand Victor retrouve le confort de ses bons souvenirs, je change de style de mise en scène. 

Pourquoi avez-vous choisi de faire du personnage de Daniel Auteuil un auteur de BD? Est-ce un clin d’œil à son amitié avec Gérard Lauzier?

Non, j’ai écrit le personnage avant de connaître Daniel Auteuil. Je cherchais un métier qui aurait permis à Victor de garder une trace de ses souvenirs. Il aurait pu être écrivain ou journaliste. Mais c’est également un film sur l’artisanat, le cinéma, le théâtre. Il y a une fantaisie dans ses dessins, ce qui permet à Antoine de reproduire cette fantaisie dans sa mise en scène.

Le personnage d’Antoine, joué par Guillaume Canet, est-il un autoportrait?

Il y a des éléments autobiographiques mais également plein de clins d’œil aux réalisateurs de la Nouvelle Vague qui avaient tendance à confondre leur amour pour l’actrice et le personnage qu’elle interprétait. 

Comment avez-vous imaginé la bande originale, qui est composée de plusieurs titres mélancoliques comme J’ai dix ans d'Alain Souchon, The Man I Love de Billie Holliday ou (There's) Always Something There to Remind Me de Dionne Warwick?

Ce sont mes goûts personnels. J’utilise la musique que j’écoute. Et puis le film se baladant en permanence entre la comédie et le drame, chaque morceau devait porter en lui ce mélange. 

Comme votre premier film M. & Mme Adelman, La Belle époque se déroule en partie dans les années 1970. Votre prochain film, OSS 117 3, se situe dans les années 1980. Pourquoi reconstituer l’histoire et interroger le passé est-il si important pour vous? 

Le passé c’est comme un pays exotique. Et j’aime que les films nous transportent ailleurs. Dans une sorte de rêve très familier. Et puis c’est l’époque que mes parents m’ont le plus racontée, d’où ce fantasme chez moi. D’autre part, placer les personnages dans une autre époque permet parfois de souligner des sentiments intemporels. 

OSS 117 3 est le premier que vous réalisez dont vous n’avez pas écrit le scénario. Avez-vous apporté des modifications, des ajouts au scénario de Jean-François Halin?

Oui, j’ai adapté avec Jean-François son scénario. Nous nous sommes beaucoup amusés. Le but était que ce film soit à la fois totalement respectueux de la griffe de Jean-François, mais que je puisse aussi m’y exprimer. On a beaucoup travaillé.
Jérôme Lachasse