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Cinéma

Le festival de Deauville couronne un pamphlet contre la "virilité à la John Wayne"

Jim Cummings, réalisateur de Thunder Road, couronné pour son premier long-métrage.

Jim Cummings, réalisateur de Thunder Road, couronné pour son premier long-métrage. - Charly Triballeau - AFP

Pour son tout premier long métrage, Jim Cummings a conquis le festival du cinéma américain de Deauville.

Un coup de maître! Le 44e festival du cinéma américain de Deauville a couronné samedi "Thunder Road", pamphlet tragi-comique contre la "virilité à la John Wayne" réalisé et joué par Jim Cummings. Il s'agit du premier long métrage de l'Américain de 31 ans.

"Quelle joie d'assister à la naissance d'un artiste, à l'arrivée d'une comète qui suscite les rires et les pleurs avec une singularité qui nous bluffe", a déclaré Sandrine Kiberlain, la présidente du jury juste avant de remettre le prix.

L'actrice a salué "un film insolite et si inventif, écrit, joué et réalisé par un jeune homme à part (...), un film qui a le mérite de ne ressembler à aucun autre". Il sort mercredi en France. Présenté jeudi dernier à Deauville, cette ode à la sensibilité masculine, financée auprès du public sur internet, avait remporté un vif succès auprès des festivaliers.

Outre Sandrine Kiberlain, le jury était composé des comédiennes Sabine Azéma, Leïla Bekhti et Sara Giraudeau, de la romancière Leïla Slimani, de l'auteur-compositeur Alex Beaupain, du réalisateur Stéphane Brizé (La loi du marché), et des comédiens et réalisateurs Xavier Legrand et Pierre Salvadori.

"Masculinité toxique"

Le film dresse le portrait d'un homme, simple policier de profession, dont le comportement apparemment étrange, politiquement incorrect, voire dérangé, a déclenché l'hilarité des spectateurs deauvillais. Le genre de personnage qui, le jour des funérailles de sa mère, danseuse, tente, à l'église, une chorégraphie burlesque inspirée de "Thunder Road" de Bruce Springsteen. 

Mais le spectateur se retrouve bien vite sur un fil entre rire et larmes lorsqu'il s'aperçoit que Jim Arnaud, dyslexique, est aux prises avec sa difficulté à gérer la violence de ses émotions. Une spirale infernale semble s'être enclenchée lorsque son ex-compagne menace de lui retirer la garde de sa fille.

"J'ai grandi à la Nouvelle Orléans, où le mythe du dur à la John Wayne est une religion. C'est terrible. Ça joue sur le taux de suicide. Mon but était que ces gens qui sont dans cette masculinité toxique me voient faire ce numéro à la Charlie Chaplin, qu'ils se moquent du personnage en se disant 'c'est un idiot', avant de se surprendre à être séduit, à pleurer abondamment", avait expliqué jeudi lors d'une conférence de presse Jim Cummings.

"Tout le monde peut le faire"

"Je ne crois pas que Jim Arnaud soit un malade mental. Il a du chagrin face à une perte. Il se bat pour entrer en connexion avec les gens", a poursuivi l'homme orchestre de ce long métrage, inspiré par "les films de Pixar comme Vice Versa, où vous riez tout le temps jusqu'au moment où vous pleurez très fort", qu'il "adore". "Cet homme a des émotions qu'il ne sait pas gérer parce qu'on ne lui a appris qu'à les réprimer, en se prenant au sérieux", a ajouté le jeune réalisateur.

Au-delà, "aux Etats-Unis, il y a beaucoup d'agressions parce que les gens sont incapables d'exprimer leurs sentiments. Cela se traduit par de la violence. Tous les Américains ont une arme. C'est terrible", a poursuivi Jim Cummings dans un entretien accordé vendredi à l'AFP. Après le succès du court métrage, dont ce film est tiré, au festival américain Sundance en 2016, Jim Cummings s'est battu pendant un an pour trouver les financements.

"Tout le monde peut le faire. Je n'étais rien avant ce film. Mais je me suis filmé en train de jouer ce que je n'avais au départ pas écrit pour moi. Et c'est plus convaincant qu'un scénario" de papier pour trouver des financements, avait aussi expliqué le réalisateur.

Le Prix du jury est attribué à deux longs métrages: Night comes on, un premier film, de Jordana Spiro, et American animals un premier film également, de Bart Layton. 
J.C. avec AFP