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Cinéma

La Ch'tite Famille: Laurence Arné ou la force (comique) tranquille du cinéma français

Laurence Arné avec Dany Boon dans "La Ch'tite Famille", en salles le 28 février

Laurence Arné avec Dany Boon dans "La Ch'tite Famille", en salles le 28 février - David Koskas - Pathé

A l'affiche de La Ch'tite Famille, qui sort dans les salles françaises ce mercredi 28 février, Laurence Arné tire son épingle du jeu dans cette nouvelle comédie efficace signée Dany Boon. Et si 2018 était son année? Rencontre avec une actrice à qui le cinéma devrait désormais faire les yeux doux.

"Elle a quelque chose de Cameron Diaz, parce qu'elle est drôle, très bonne comédienne et en même temps jolie." "Elle a un talent comique incroyable. Sous son physique de 'bombasse', elle amène un truc irrésistible de drôlerie, comme ces actrices américaines des années 50 qui peuvent tout jouer. Une sorte de Cary Grant au féminin". Que ce soit le réalisateur Maxime Govare, qui l'a récemment dirigée dans Daddy Cool, ou François Berléand, qui lui donne la réplique dans La Ch'tite Famille, ceux qui la connaissent ne tarissent visiblement pas d'éloge sur son talent.

Mais Laurence Arné préfère la jouer modeste. Quand on lui rapporte les propos de ses collègues, l'actrice s'en amuse en les balayant poliment. "C'est agréable à entendre, mais bon, ce sont des amis!". Reste que la comédienne n'a pas volé ses compliments. Et en décrochant le premier rôle féminin de la très attendue nouvelle comédie de Dany Boon, elle fait indéniablement un pas de plus dans la cour des grands.

Laurence Arné et François Berléan dans "La Ch'tite Famille", en salles le 28 février 2018
Laurence Arné et François Berléan dans "La Ch'tite Famille", en salles le 28 février 2018 © David Koskas - Pathé

Avant que le 7ème Art ne s'intéresse à elle, c'est sur scène, dans des one-woman-show à l'humour corrosif, que Laurence Arné a fait ses premières armes. Repérée notamment par Dominique Farrugia (qui lui offrira son premier rôle au cinéma dans L'amour c'est mieux à deux), la jeune femme gravit les échelons et s'offre un nouveau public en décrochant l'un des rôles phares de la série à succès WorkinGirl sur Canal+ où elle incarne une DRH nymphomane. Un humour trash, cash, qui contraste avec son physique de mannequin à la blondeur hitchcockienne. Laurence Arné se fait remarquer. Et le cinéma la remarque alors. 

"Je lis toujours le script avant, même si c’est Dany Boon!"

Après avoir enchaîné les rôles au cinéma dans des comédies passées relativement inaperçues à leur sortie, c'est au côté de Dany Boon (déjà) que l'ancienne étudiante en communication et sociologie rencontre son premier grand succès sur grand écran avec Radin! en 2016 (2,9 millions d'entrées). "On s'était très bien entendu, nous confie l'actrice. On s’était dit que ce serait chouette de retravailler ensemble, mais comme on peut le dire avec pleins d’acteurs à chaque fois qu’on termine un film". Sauf que Dany Boon ne tarde pas à lui proposer un rôle dans sa prochaine comédie La Ch'tite Famille. Une proposition qui ravit forcément Laurence Arné, mais qu'elle reçoit avec prudence. 

"J'ai un rapport très naturel et sain avec le boulot, je ne suis pas dans une hystérie. Je lui ai simplement fait: "Super, j’ai hâte de lire!', se souvient-elle. J'aime bien lire le script avant, toujours, et même si c’est Dany Boon!"

Mais peut-on vraiment refuser une offre de Dany Boon? "Refuser, je ne sais pas, modère-t-elle. Mais j'ai eu de la chance, j’ai beaucoup aimé. Mais Dany est quelqu’un de très à l’écoute, j’ai pu faire beaucoup de propositions. Il y a des réalisateurs qui ne supportent pas." Mais pas cet enfant du Nord, dont elle loue la simplicité, l'exigence, la justesse et le professionnalisme. "Dany n’est jamais stressé, c'est hallucinant! Il est dans le plaisir, le partage. Sa démarche est toujours authentique, honnête. Sur le plateau, on a l’impression d’être sur un petit film très familial, on ne ressent pas toute l’artillerie derrière."

D'Angoulême à Paris

Dans La Ch'tite Famille, Laurence Arné incarne Constance Brandt, la compagne de Valentin (joué par Dany Boon) avec qui elle forme un couple d'architectes designers en vogue, et qui va découvrir les origines Ch'ti de son mari lorsque celui-ci, à la suite d'un accident, va perdre la mémoire et se retrouver 20 ans en arrière... Ce rôle, auquel elle apporte une vraie profondeur, Laurence Arné a tenu à le faire évoluer pour ne pas l'enfermer dans le cliché de la Parisienne superficielle. "Ce film est une histoire de famille, mais c’est aussi trois histoires de couples. Je voulais qu'on découvre à l'écran une vraie histoire d'amour. Dans les comédies souvent, j’ai du mal à croire à l’histoire, je trouve qu’il n’y a pas de vécu, que tout est traité de manière superficielle."

Autre thème principal du film de Dany Boon: la reconnexion avec ses racines. Un sujet qui dépasse largement les frontières "Ch'ti". "Je me suis reconnue dans cette histoire, nous confie la native d'Angoulême. Je viens de province et je me suis retrouvée dans ce besoin de fuir ces petites villes qui peuvent être oppressantes quand tu as de l'ambition, de la bonne ambition! Et ça peut être mal vu parfois..."

"Quand je rentrais là-bas, j'avais droit au surnom "la Parisienne" ou des remarques du type 'Ah, y a pas de métro ici!'... J'en ai un peu souffert au début, même si en même temps, j’ai déclenché ce mini-rejet car j'avais besoin de m'éloigner de mes racines. A un moment, on essaye de se trouver, on se chercher et on se perd parfois aussi."

"J'ai eu besoin de retrouver mes racines"

Et à l'instar du personnage de Dany Boon dans sa nouvelle comédie, le retour aux sources s'est avéré nécessaire dernièrement pour Laurence Arné. "Arriver à un certain âge, tout retombe, explique-t-elle. J’ai eu 35 ans et là, tout s’est remis en place, j’ai eu besoin de me retrouver chez mes parents, d’aller à Angoulême, d’aller me balader, d’aller revoir mon collège, j'avais besoin de reconnexion."

"D'ailleurs, à la fin du tournage de La Ch'tite Famille, je suis allée dans le village de ma grand-mère en Hollande, qui était à deux heures de notre lieu de tournage dans le Nord. J’ai pris ma voiture, j’ai été là-bas, je suis allée au cimetière, j’ai fait tout le parcours de ma famille. J’avais ce besoin de retrouver mes racines. C’est là que je trouve le film super juste, car on est dans une société où on peut vite être déraciné, happé par des milliards de choses. On n’est plus ancré, et à un moment donné, ça se fait naturellement, ça fait du bien."

"Le cinéma est un univers assez macho"

Celle qui s'est éloignée de ses rôles de femme-enfant pour des rôles plus femme-adulte dans ses deux derniers films semble avoir franchi un nouveau cap dans sa carrière. Encore une "histoire de reconnexion", sans doute, s'amuse-t-elle. Et alors que l'entretien touche à sa fin, il est impossible de ne pas évoquer avec elle le sujet qui a provoqué un séisme dans le monde du cinéma (mais pas seulement). Que pense alors l'héroïne de la pastille humoristique Les filles d'aujourd'hui du combat des femmes d'aujourd'hui?

De l'affaire Weinstein et de ses conséquences, Laurence Arné résume sa pensée: "C’est bien que les langues se délient. Le cinéma est un univers assez macho, encore. Après, j’ai des amies qui travaillent dans des entreprises, et c’est bien pire. Dans la grande distribution, il y a des univers atroces. C’est bien que les femmes parlent. Ca arrive très tard, et c’est étonnant que des gros dossiers comme Weinstein arrivent seulement maintenant."

Et d'ajouter, plus mesurée: "En revanche, je trouve qu’il faut faire attention avec les réseaux sociaux, car on peut détruire quelqu’un en deux secondes. Il peut y avoir de la manipulation, des personnes mal intentionnées. Il faut laisser faire la justice, même si parfois elle est très lente." A l'inverse de son ascension dans les sommets du box-office qui s'annonce fulgurante dans les prochains jours avec cette sympathique Ch'tite Famille. Et en attendant la suite de Radin!...