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Harry, un ami qui vous veut du bien, Le Labyrinthe de Pan, Turf… Sergi López commente sa filmographie

Sergi Lopez dans Le Labyrinthe de Pan

Sergi Lopez dans Le Labyrinthe de Pan - Wild Side

L’acteur catalan est à l’affiche depuis mercredi du Voyage de Marta, un film initiatique tourné au Sénégal. Il commente cinq étapes de sa carrière, de Harry, un ami qui vous veut du bien à L’Homme qui tua Don Quichotte en passant par Le Labyrinthe de Pan.

Depuis une trentaine d’années, Sergi López passe du cinéma d’auteur aux productions populaires. Connu pour ses rôles marquants dans Western, Harry, un ami qui vous veut du bien ou Le Labyrinthe de Pan, il est aussi à l’aise pour tourner en espagnol, en français et en anglais.

À l’occasion de la sortie, mercredi, du Voyage de Marta, un film initiatique tourné au Sénégal, l’acteur catalan commente cinq étapes de sa carrière. Il évoque ses souvenirs de tournage avec Guillermo del Toro et Terry Gilliam et livre quelques informations sur le prochain Woody Allen, dans lequel il tourne la semaine prochaine.

Le Voyage de Marta de Neus Ballús

"Neus Ballús, la réalisatrice, a commencé dans le documentaire. Le Voyage de Marta est sa première fiction. Neus m’a connu sur le tournage d’un film espagnol où je devais travailler avec un enfant de huit ans. Je faisais le lien entre le metteur en scène et l’enfant pour qu’il puisse être dans de bonnes dispositions pour jouer. Neus m’a proposé un rôle dans Le Voyage de Marta pour notamment aider les acteurs non-professionnels.
Il fallait se fondre dans le décor, parmi les vrais gens qui vivent au Sénégal, là où a été tourné le film. Les non-professionnels ont forcément moins de bouteille, mais peuvent se sentir plus libres et être plus spontanés. En tant qu’acteur, on est forcément inspiré par ça. L’histoire est simple, avec cette adolescente qui découvre ce que c’est d’être adulte, d’être une femme au Sénégal, mais il y a derrière plein de thèmes: la colonisation, le tourisme..."

Le nouveau Woody Allen

"Le tournage a commencé le 10 juillet. Je tourne le 25. J’ai rencontré Woody Allen, on a fait une conférence de presse. J’ai quatre scènes à jouer. J’ai reçu uniquement les scènes que je devais jouer. C’est un truc surréaliste! J’ai dû appeler le producteur pour lui demander où s’inscrivaient ces scènes. Il m’a tout expliqué et on va m’envoyer le scénario avec l’histoire et les dialogues. Dans Midnight in Paris, il rendait hommage à la littérature et à la peinture. Là, il tourne à San Sébastian, dans le pays basque, en plein festival [du film de San Sébastian]. Ce sera un petit hommage au cinéma européen."

L’Homme qui tua Don Quichotte de Terry Gilliam

"J’ai eu un coup de foudre pour Terry Gilliam. C’est un truc énorme, Terry Gilliam. Il a fait des films de fou. Il n’est jamais dans la simplicité. Il est dans l’excès. Quand j’ai lu le scénario, j’ai toute de suite remarqué son humour, mais tu ne sais pas ce que ça peut donner. C’est sur le tournage que tu te rends compte que Terry Gilliam est sans complexe - un peu à la Monty Python. C’était une grosse production.

Je me souviens de Terry Gilliam assis devant son combo [enregistreur qui diffuse l'image et le son de la prise tournée, NDLR], qui se marrait. Tout le monde me disait: ‘dès que tu es à l’écran, il se marre.’ Il venait aussi sur le plateau et se mettait à jouer avec moi, à improviser ou à refaire la scène. Il a 74 ans, des problèmes d’audition et beaucoup d’énergie! C’est une locomotive, comme Guillermo del Toro. Le tournage du premier Don Quichotte [avec Jean Rochefort et Johnny Depp, NDLR] s’était arrêté au bout du septième jour. Sur le tournage de la version de 2019 [avec Adam Driver et Jonathan Pryce, NDLR], j’étais présent le septième jour. Toute la journée, l’équipe avait des pancartes pour l’encourager! On est arrivé à terminer le film et c’était jouissif. J’adore le résultat."

Turf de Fabien Onteniente

"Je me suis retrouvé sur Turf parce qu’on m’a dit qu’il y avait une idée plus profonde que ce que l’on pouvait croire, que c’était plus qu’une simple comédie, qu’il y avait un auteur à découvrir. L’idée était de s’approcher des grands auteurs de la comédie italienne. Sur le tournage, je ne sais pas, on avait l’impression que chacun faisait ce qu’il avait à faire. Il y avait pourtant toute une palette de grands acteurs comiques comme Alain Chabat, Edouard Baer, Lucien Jean-Baptiste. On essayait tous de faire du mieux possible malgré les ‘conditions météorologiques’… [il y a eu des tensions sur le tournage, NDLR]. Je ne sais pas ce qu’on peut dire d’autre sur ce film…"

Le Labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro

"Quand [Guillermo del Toro] m’a présenté le film, il m’a dit qu’il avait vu tous mes films et que je pouvais faire un des meilleurs méchants de l’histoire du cinéma espagnol. Il n’avait pas de scénario et m’a raconté pendant une heure et demie l’histoire. J’avais la bouche ouverte. Il la racontait très bien avec tous les détails.
Del Toro, c’est un génie, une bombe déguisée en mec sympa en t-shirt noir et fan de BD. Il connaît la peinture, la littérature, le cinéma… C’est un véritable auteur qui a son propre univers bourré de références. Sur un tournage, il est très efficace. Il ne parle pas de ses références, mais donne des indications très précises.

Je n’ai jamais fait de répétition aussi précise qu’avec lui. Il me disait: ‘Tu te mets à genoux. Tu tournes la tête ici pour avoir la lumière. Tu comptes jusqu’à trois. Tu respires une fois. Tu dis ta réplique, puis tu comptes jusqu’à trois…' Tout était tellement dirigé que c’est le seul exemple que j’ai dans ma vie de quelqu’un qui fait ça et dont je me dis en voyant le résultat: ‘putain c’est vachement bien’. Il vient de la BD où il est obligé de découper chaque planche, chaque regard. Il sait exactement ce qu’il veut."

Harry, un ami qui vous veut du bien de Dominik Moll

"C’est le film, encore aujourd’hui, qui aide les gens à me reconnaître. Ils me disent: ‘J’ai vu ce film Harry, Henry… un gendre très sympa’ (rires). C’est un film qui est souvent passé à la télévision et qui a marqué. Il est plus connu en France qu’en Espagne, où il est sorti sur huit ou dix copies [il a été vu par presque deux millions de spectateurs en France, NDLR].
J’ai le souvenir d’avoir tourné une comédie. [Le réalisateur] Dominik Moll est un fan de Hitchcock et il avait l’idée d’aller vers l’horreur en conservant l’humour. J’ai pris beaucoup de plaisir à jouer Harry. Tout tourne autour de lui. Tous les personnages, toutes les situations, toutes les répliques nourrissent cette personnalité. Ce n’est donc pas la peine d’en rajouter, car les autres jouent pour toi. Moins tu joues, plus la réaction des gens est forte."

Jérôme Lachasse