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Cinéma

Golshifteh Farahani: "Alain Chabat est la seule personne en France qui comprend mon sens de l’humour"

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L’actrice iranienne explore dans Un divan à Tunis un genre qu’elle pratique peu: la comédie. L’occasion de revenir avec elle sur ses expériences en la matière, de Santa & cie d’Alain Chabat au remake américain d’Intouchables.

Depuis le début de sa carrière, l’actrice iranienne Golshifteh Farahani, qui a quitté son pays en 2008, n’a pas souvent ri au cinéma. À l’affiche de quelques comédies (Deux amis, Santa & cie), elle n’y est jamais à l’origine du rire. Pourtant, elle aime la comédie. Elle y consacre actuellement toute son énergie: "C’est tout ce que j’aime faire en ce moment. Je crois qu’on peut trouver beaucoup de sens dans la vie grâce à la comédie", dit-elle. 

Son actualité lui donne raison: l’actrice est à l’affiche ce mercredi 12 février d’Un divan à Tunis, une comédie ensoleillée et pétillante sur une femme de retour en Tunisie après la révolution de 2011 pour y ouvrir un cabinet de psychanalyse. "On a Dieu, on n’a pas besoin de ses conneries", entend son personnage dès son arrivée à Tunis.

Situations absurdes et gens un peu "ouf"

"L’Orient passe par la prière, et non par la psychanalyse”, analyse l’actrice. "L’Orient est spirituel et l’Occident scientifique. La beauté de la vie se découvre quand on arrive à mêler spiritualité et science". Les journalistes se sont empressés de voir dans son personnage un écho de sa situation.

"Tout le monde me pose des questions sur l’exil, mais moi j’ai vu dans le film l’histoire d’une fille qui va en Tunisie et se retrouve au milieu de situations absurdes et de gens un peu 'ouf', comme vous dites. Elle essaie de faire ce qu’elle a envie de faire. C’est ce que j’ai vu dans le film. Le scénario m’a fait beaucoup rire quand je l’ai lu."

Et pourtant ce n’est pas elle qui provoque le rire dans le film: "Ce sont les personnages qui m’entourent qui sont très drôles! Elle, elle est très sérieuse au milieu de ce bordel. Elle est très cowboy". 

"Avec Alain Chabat, on a le même sens de l’humour"

Peu habituée pour l’instant au registre comique, elle ne trouve pas cela plus difficile que le drame: "La comédie a besoin d’une bonne mise en scène, d’un bon réalisateur." Elle peut en témoigner, elle qui a travaillé sous la direction d’Alain Chabat dans Santa & cie. L’ambiance était différente d'Un divan à Tunis pour un résultat aussi drôle à l’écran: 

"La grande différence, c’est qu’on rigolait beaucoup sur le tournage de Santa & cie. Sur celui d'Un divan à Tunis, on n’a pas du tout rigolé. On était très sérieux. C’est pour ça peut-être que le film est rigolo. Pendant Santa & cie, on rigolait tout le temps, on se roulait par terre à force de rire. Alain Chabat est la seule personne en France qui comprend mon sens de l’humour. On a le même sens de l’humour un peu enfantin..." 

Avant Chabat, l'Américain Jim Jarmusch est le premier à avoir décelé sa dimension comique en lui confiant dans Paterson le rôle de l’épouse "plutôt joyeuse et un peu fofolle" d'Adam Driver

"Jarmusch est la première personne dans ma vie à être venue vers moi pour un rôle comme ça. Avant, il n’y avait rien de moi de léger [dans les films]. Je ne sais pas où il a vu cela en moi. C’était un clin d’œil de Dieu, comme on dit parfois chez nous. Même aujourd’hui je ne comprends pas. C’était une telle joie d’être dans ce film. Ce film, c’était comme une retraite de méditation. Quand je suis sortie de la projection à Cannes, j’étais tellement calme. Je ressentais de la joie absolue, du soulagement. C’était beau, spirituel." 

"Ils ont tellement américanisé Intouchables!"

Elle n’a pas retrouvé cette spiritualité sur le tournage de la comédie The Upside, le remake américain d’Intouchables.

"Parfois, on fait du cinéma américain parce qu’on aime le faire, et parfois on le fait parce qu’il faut le faire, comme un devoir. Là, c’était comme ça. Quand j’ai lu le scénario, je me dis: 'Putain! Ils ont tellement américanisé Intouchables!' Intouchables, c’est déjà commercial et populaire en France, mais là en enlevant les trucs sociaux, ils l’ont rendu encore plus américain, c’est vraiment de l’impérialisme."

Si The Upside "n’était pas très satisfaisant pour [elle]", Golshifteh Farahani en tire "la joie" d’avoir pu retrouver sur le tournage une partie de l’équipe de Paterson. Aujourd’hui, cette recherche comique se poursuit, bien que ses tribulations cinématographiques ne soient pas aussi amusantes qu’elle le souhaiterait:

"J’ai fait Blind Spot, le film de Pierre Trividic et Patrick-Mario Bernard, j’étais aveugle, ce n’était pas une comédie. J’ai fait un film pour Netflix, un blockbuster où j’ai tué 1.000 personnes. Et là, je tourne une série où on ne rigole pas du tout", énumère-t-elle avant de conclure: "Mais j’essaie de faire rire."
Jérôme Lachasse