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Cinéma

De Serge le mytho à Premières vacances, rencontre avec Jonathan Cohen, le roi de l’improvisation

Jonathan Cohen

Jonathan Cohen - Bertrand Guay / AFP

L’humoriste, à l’affiche ce mercredi 2 janvier de la comédie Premières vacances avec Camille Chamoux, raconte son rapport à l’humour et à l’improvisation. Et évoque la suite des aventures de Serge le mytho.

Après avoir visité la Hongrie dans Budapest, Jonathan Cohen arpente la Bulgarie dans Premières vacances, mélange de comédie romantique et de road movie qui sort en salles ce mercredi 2 janvier. L’humoriste aperçu dans Papa ou maman 2 et Coexister partage l’écran avec Camille Chamoux, qui co-écrit le scénario.

Le duo incarne Ben et Marion, un homme et une femme qui viennent de se rencontrer sur Tinder et décident aussitôt de partir en vacances en Bulgarie, située à mi-chemin de leurs destinations rêvées. L’occasion idéale pour découvrir son partenaire. L’occasion idéale, aussi, pour Jonathan Cohen et Camille Chamoux d’aborder un sujet rarement évoqué dans les comédies romantiques: les selles.

"Ce n’est pas la vie que l’on veut pas voir", concède l’humoriste. Sur cette thématique précise, le film réalisé par Patrick Cassir ne dissimule rien au public. "Pourquoi est-ce que l’on vous montre ça? Parce que ça fait vraiment partie de ce qu’il faut gérer quand on est en couple, surtout au début, et en vacances. La gestion gastrique, c’est quelque chose dont on a honte, qu’on ne veut pas assumer, qu’on veut totalement occulter, comme si ça n’existait pas, mais parfois on se retrouve dans une situation où les chiottes sont en face du lit et on doit gérer cette histoire sans que ce soit une horreur."

Il est rare de voir une comédie française évoquer ce sujet avec autant de passion. L’irruption de ce comique scatologique dans un film "un peu d’auteur” l’a tout de suite séduit: "Pour moi, c’est le bon mix. Il y a cet humour potache, puis dès la scène suivante on retrouve des cadres assez indés d’humour. On n’est pas Philippe Lacheau ou Franck Gastambide là-dessus. C’est juste une scène où on a voulu pousser le curseur. On ne voulait pas ne pas le pousser."

Jonathan Cohen cherche cet équilibre dans tous ses films. Il l’a trouvé en 2018 dans Ami-Ami de Victor Saint-Macary et Budapest de Xavier Gens. "Il ne faut pas se laisser emprisonner par un genre sinon ça donne des films un peu consanguins, des films que l’on reconnaît et qui vont plaire uniquement à une certaine partie de gens. Je trouve ça trop clivant.

"Lorsque j’ai vu du chorizo et du fromage, je me suis dit que c’était un cadeau du ciel."

“Pour aller au-delà de ce qui est écrit” et sans cesse se surprendre, Jonathan Cohen improvise donc beaucoup. Dans Premières vacances, c’est en découvrant du chorizo sur le plateau qu’il a imaginé une longue scène où il ne peut s’empêcher de manger tout en faisant l’amour avec le personnage de Camille Chamoux :

"Le réalisateur voulait une belle scène d’amour très stylée avec une petite lumière. Lorsque j’ai vu du chorizo et du fromage, je me suis dit que c’était un cadeau du ciel. Le personnage a faim et très souvent dans ce genre de situation tu n’oses pas. Il essaye de le faire discrètement et il se fait griller: ça prend une dimension originale et drôle et en même temps ils s’aiment. Dans un tournage il faut toujours être alerte, parce que tu as tout le temps des cadeaux. Il faut savoir les voir et les prendre. Il faut s’adapter au réel."

De Serge le mytho à Budapest, Jonathan Cohen a fait de ce don sa marque de fabrique. Il a été profondément marqué par la comédie américaine des années 2000 et notamment les films de Judd Apatow, où le réalisateur accumule des heures d’improvisation de ses comédiens avant de former son film à partir de ce magma de vannes.

Une bonne comédie repose-t-elle forcément sur l’improvisation? "Tout dépend du réalisateur et de son univers", selon Jonathan Cohen. "Il y en a qui laissent plus la place à la vie, aux comédiens et à leur personnalité. Et tu en as d’autres qui ont des univers très forts, très marqués et qui savent exactement où t’emmener et eux, il faut les suivre." Eux, c’est Olivier Nakache et Eric Toledano (Intouchables, Le Sens de la fête) et Pierre Salvadori (En liberté). Il n’a pas encore travaillé avec eux, mais a cette année fait des rencontres qui lui ont permis de se rapprocher de ce genre d’univers.

Bientôt une série Netflix et un film Serge le Mytho

On le retrouvera en 2019 à l’affiche de Blanche comme Neige, le nouveau Anne Fontaine avec Isabelle Fontaine et Benoît Poelvoorde. Il a aussi tourné avec Marina Foïs chez Sophie Letourneur, réalisateur de comédies indépendantes. A ses côtés, il a découvert une manière différente de créer: "Ce n’est pas de l’impro comme on l’entend. On improvise énormément, puis elle note tout ce que l’on dit et on doit répéter exactement ce que l’on a improvisé." Family Business, la série Netflix qu’il tournera en janvier avec Gérard Darmon, devrait se dérouler dans une ambiance plus souple.

"C’est tourné avec la famille. Igor Gottesman, qui est un super pote, a créé et développé la série. Il a déjà réalisé Five. Il y a mon meilleur pote dedans, Olivier Rosenberg. Darmon, je ne le connais pas, mais je pense qu’on va trop kiffer. Les scénarios sont cool. Ils les ont écrits en tellement peu de temps. Netflix c’est une économie très particulière: ils te disent oui et cinq mois après tu dois faire la série. Il a fallu speeder et ils ont réussi à faire en un laps de temps très court un truc trop bien."

Ce tournage entre amis devrait favoriser l’improvisation. "J’espère", sourit Jonathan Cohen. "Ça va partir en création surtout. 'Impro', ça veut tout et rien dire. C’est de la création, c’est se permettre d’être tout le temps créatif. La création, ce n’est pas uniquement à l’écriture. Il faut tout le temps être créatif."

Très prochainement, il sera aussi à l’affiche d’un film consacré à Serge le Mytho, son fameux personnage apparu dans la série Bloqués avec Orelsan et Gringe. Le tournage, qui aurait dû avoir lieu en décembre, est repoussé en raison de l'agenda chargé de Jonathan Cohen et des autres créateurs de la série Kyan Khojandi et Navo: "C’est ça qui va être le plus dur: se réunir. On a déjà toute la trame, toute l’histoire. Ça va être trop cool." Il ne reste plus qu’à créer.

Jérôme Lachasse