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Dans la forêt: comment réaliser un film fantastique en France?

Timothé Vom Dorp, Théo Van de Voorde et Jérémie Elkaïm dans le film Dans la forêt.

Timothé Vom Dorp, Théo Van de Voorde et Jérémie Elkaïm dans le film Dans la forêt. - Copyright Pyramide Distribution

ENTRETIEN - BFMTV.com a rencontré Jérémie Elkaïm, acteur principal et producteur de ce film atypique réalisé par le scénariste de Harry, un ami qui vous veut du bien.

Deux enfants se promènent dans une forêt en Suède. Soudain, un figure aussi inquiétante qu'effrayante surgit à l'écran. L'apparition est brève, comme un flash. Impossible, pourtant, de savoir si celle-ci s'est réellement produite ou si elle appartient au monde des rêves... Cette scène, qui intervient au milieu de Dans la forêt de Gilles Marchand (cinéaste et également scénariste, entre autres, de Harry, un ami qui vous veut du bien de Dominik Moll), illustre à merveille le propos du film: proposer en France un cinéma fantastique fort et original, genre souvent difficile à produire.

Acteur principal et producteur de Dans la forêt, Jérémie Elkaïm a chapeauté le projet depuis l'écriture du scénario. Il est proche de Gilles Marchand, qui a écrit avec lui et Valérie Donzelli le scénario de deux de leurs films: Main dans la main (2012) et Marguerite et Julien (2015). Dès le début, l'idée a été "de réaliser un film assez simple", nous indique Jérémie Elkaïm. "Il fallait trouver l'ambition ailleurs que dans la débauche de moyens, favoriser les émotions plutôt que de faire un grand spectacle qui coûterait très cher", explique l'acteur, avant d'ajouter: "Le film est ambigu, il ne cherche pas à trancher. Ce n’est pas un film d’horreur classique." 

"Une métaphore de la vie"

Dans la forêt emprunte malgré tout à ce genre son canevas en racontant les retrouvailles, d'abord joyeuses, puis douloureuses, entre un père et ses deux fils. Seuls dans une cabane en bois perdue au fond d'une forêt suédoise, les enfants commencent à douter de l'identité de l'homme qui dit être leur père... 

Jérémie Elkaïm, grand cinéphile, connaît bien le genre du fantastique. Les comédies qu'il a écrit avec Valérie Donzelli - notamment La Reine des pommes et Main dans la Main - en sont souvent teintées. Dans La Reine des pommes, Elkaïm joue trois personnages différents ; dans Main dans la main, après un coup de foudre, Elkaïm et Valérie Lemercier sont liés par une force étrange qui les empêchent de se déplacer l'un sans l'autre. 

"Ce qui peut me plaire et me toucher dans le fantastique, c’est que c’est toujours l’occasion de faire une métaphore sur la vie", dit le comédien. J’adore l’idée que l’on utilise le cinéma ou la fantasmagorie pour raconter des choses très concrètes de la vie, qu’en les extrapolant cela peut devenir du fantastique. C’est un genre qui est réjouissant pour cette raison."

L'importance du montage

L'étape déterminante pour le film fantastique reste le montage, qui est millimétré à la seconde près. "C'est un gros travail", concède l'acteur-producteur, qui a laissé au réalisateur toute liberté. "Il y avait des moments, lors du montage, où dans d’autres films on aurait accéléré certaines scènes. Ici, on a pris au contraire le parti de laisser planer les ambiances, de ne pas trouver d'explications rationnelles", indique Jérémie Elkaim avant de convoquer le souvenir déçu de Midnight Special, récit de science-fiction de Jeff Nichols qui, après une première heure envoûtante, déroule une série d'explications qui laisse le spectateur sur sa faim.

"C’est ce qui m’a plu chez Gilles: il a évacué tout de suite cet aspect du projet. Il a tout de suite eu la volonté de suivre ses intuitions plutôt que de construire une narration psychologique, avec des choses cohérentes qui se répondent." Un pari réussi. 

Jérôme Lachasse