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Cinéma

Berlinale 2020: polémique autour d'anciennes déclarations jugées sexistes de Jeremy Irons

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Le président du jury fait face à d'anciennes déclarations jugées sexistes et homophobes. Il s'en est expliqué ce jeudi lors d'une conférence de presse.

Sigourney Weaver, Javier Bardem et... Hillary Clinton: la Berlinale, premier grand festival de cinéma de l'année en Europe, déroule son tapis rouge à partir de ce jeudi pour une 70e édition aux accents politiques, avec une nouvelle direction aux manettes.

La célèbre actrice d'Alien doit ouvrir les festivités jeudi soir aux côtés de Margaret Qualley. Elles viendront présenter My Salinger year du Canadien Philippe Falardeau (hors compétition), sur les ambitions littéraires d'une jeune femme travaillant chez un célèbre agent.

Durant les onze jours du festival, quelque 340 films venus du monde entier seront projetés dont 18 en lice pour l'Ours d'or, remis le 29 février par un jury présidé par l'acteur britannique Jeremy Irons.

D'anciennes déclarations resurgissent

Tentant de déminer une polémique naissante, suite à la réapparition dans la presse allemande d'une ancienne interview où il tenait des propos jugés sexistes, le Britannique a affiché son soutien aux mouvements pour "protéger les femmes contre toute forme de harcèlement", au droit à l'avortement et au mariage pour tous.

"J'espère que certains des films que nous allons voir parleront de ces questions... et voir des films qui nous incitent à questionner nos attitudes, nos préjugés", a-t-il déclaré lors de la conférence de presse du jury, composé notamment des acteurs Bérénice Bejo (The Artist) et Luca Marinelli (Martin Eden) ainsi que des réalisateurs Kenneth Lonergan (Manchester by the sea) et Kleber Mendonça Filho (Bacurau).

Jeremy Irons avait déclaré en 2013 au Huffington Post qu'il craignait que l'ouverture du mariage aux couples de même sexe permette aux pères d'épouser leurs fils pour éviter les impôts sur l'héritage. Comme le rapporte le Hollywood Reporter, il avait estimé dans une autre interview que les femmes de l'industrie du divertissement qui se plaignaient de violences sexuelles étaient en partie responsables. Enfin, dans les colonnes du Guardian en 2016, il avait déclaré: "les femmes doivent avoir le droit de (se faire avorter), mais je pense aussi que l'Église a raison de dire que c'est un péché".

Le passé nazi d'un ancien directeur révélé

En plus d'être un anniversaire, cette 70e édition ouvre un nouveau chapitre pour la Berlinale: après avoir officié à la direction pendant 18 ans, l'Allemand Dieter Kosslick a cédé sa place à un duo plus jeune, composé de l'Italien Carlo Chatrian, ancien directeur du festival de Locarno, et de la Néerlandaise Mariette Rissenbeek. 

Le début de polémique autour de Jeremy Irons n'est pas le seul chantier que le duo a dû déminer en amont: des révélations récentes sur le passé nazi d'un ancien directeur de la Berlinale les a contraints à renommer le Prix Alfred-Bauer et à le remplacer par un Ours d'argent. Le festival a d'ailleurs confié une enquête à ce sujet à l'Institut d'histoire contemporaine de Munich.

"Faire de la place à la diversité"

Objectif de cette nouvelle édition: "faire de la place à la diversité", en proposant des nombreux films réalisés par des femmes, des oeuvres du monde entier, avec un gros contingent venant du Brésil, des sujets politiques et une nouvelle section baptisée "encounters", proposant souvent des films de niche entre documentaire et fiction. 

Alors que le débat sur le manque de femmes et d'artistes noirs dans le cinéma bat son plein, après les Baftas britanniques et les Oscars, la Berlinale va proposer six films dirigés ou codirigés par des réalisatrices cette année. Soit, un peu moins que l'an dernier.

Grand écart

Mêlant auteurs connus des cinéphiles (Philippe Garrel, Tsai Ming-liang et Kelly Reichardt) et découvertes, la sélection 2020, ouverte au public comme aux journalistes, n'hésite pas à faire le grand écart entre There is no evil de l'Iranien Mohammad Rasoulof, interdit de sortie de territoire, et la dernière comédie du duo français Kerven-Delépine qui s'attaque aux géants du web et à nos habitudes numériques.

Hors compétition, les spectateurs pourront également découvrir le nouveau film de l'écurie Pixar (En avant), le Pinocchio de Matteo Garrone, déjà sorti en Italie et plusieurs séries dont The Eddy, bientôt sur Netflix, de Damien Chazelle, le réalisateur de La La Land.

Helen Mirren à l'honneur

La liste d'invités est fournie: la présence de Javier Bardem, Elle Fanning et Salma Hayek, à l'affiche de The Roads not taken (en compétition), devrait ravir les photographes tout comme celle de Johnny Depp qui incarne à l'écran le photographe W. Eugene Smith dans Minamata (hors compétition). 

Helen Mirren recevra quant à elle un Ours d'honneur pour l'ensemble de sa carrière. Malgré une dimension glamour, le festival n'en sera pas moins politique avec une programmation à l'avenant: Hillary Clinton est attendue pour la projection du documentaire qui lui est consacré et le réalisateur ukrainien Oleg Sentsov, emprisonné cinq ans, doit présenter son deuxième film Numbers, inspiré de son incarcération.

L'an dernier, le jury présidé par Juliette Binoche avait sacré Synonymes de Navad Lapid, film critique sur l'identité israélienne.

Benjamin Pierret, avec AFP