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Cinéma

Atomic Blonde: quand les femmes s'emparent du cinéma d'action

Charlize Theron et Sofia Boutella dans "Atomic Blonde", en salles ce mercredi 16 août.

Charlize Theron et Sofia Boutella dans "Atomic Blonde", en salles ce mercredi 16 août. - Focus Features - Jonathan Prime

Charlize Theron impressionne en espionne adepte d’arts martiaux dans son nouveau film Atomic Blonde. Le dernier avatar d'une lignée d'héroïnes à poigne.

Quelques semaines après le triomphe de Wonder Woman, le timing d’Atomic Blonde avec Chalize Theron est parfait. En plein "avènement d’une nouvelle vague féministe luttant contre l'administration Trump", le long métrage devrait remporter un large succès, souligne Variety dans un article consacré à la star et productrice de ce film d’action situé en pleine Guerre froide au pied du Mur de Berlin.

Charlize Theron s'est battue pendant cinq ans pour mener à bien Atomic Blonde, supervisant chaque étape du projet. Elle n’a rien laissé au hasard. L’échec cuisant du récit futuriste Æon Flux en 2005 est encore trop présent. "Quand on m’a proposé Æon Flux, je me suis dit que ça pouvait donner quelque chose d’intéressant", confie-t-elle à Variety. "Je n’étais pas tout à fait emballée par le concept, mais j’avais adoré le film de la réalisatrice [Girlfight de Karyn Kusama, NDLR]. Alors je m’y suis lancée en croyant que c’était une grande réalisatrice. Mais on a merdé. On n’a pas vraiment su comment faire fonctionner le film", concède-t-elle aujourd'hui.

La revanche d’une blonde

Avec Atomic Blonde, Charlize Theron tient enfin sa revanche. Elle a débauché un scénariste, Kurt Johnstad (300), puis un réalisateur, David Leitch, responsable de John Wick (2014) et de Deadpool 2 (2018). Celui-ci a privilégié comme dans le film d'action avec Keanu Reeves des scènes d’action tonitruantes, très stylisées (néons et Father Figure de George Michael sont de la partie), et réalisées en plans-séquences pour permettre une meilleure visibilité de la chorégraphie. A la fin du film, Theron impressionne lors un plan-séquence de sept minutes où elle affronte dans un immeuble vide, puis dans une voiture, une armée de sbires soviétiques.

Dans Atomic Blonde, celle qui a brillé dans le rôle de Furyosa dans Mad Max: Fury Road (2015) de George Miller incarne une espionne britannique débarquant à Berlin quelques jours avant la chute du fameux Mur. Véritable nid d’espions, la ville regorge d’êtres interlopes, comme James McAvoy, qu’elle affronte à coup de pistolets, d’armes blanches et de talons de chaussures. Obtenir ce rôle est une rare opportunité que l’actrice-productrice savoure aujourd’hui dans les colonnes de Variety: "On m’a offert beaucoup de rôle dans des films d’actions, mais c’était soit pour la fille cachée derrière son ordinateur soit pour l'épouse". 

De Ripley à Lucy

Charlize Theron est la dernière dans une lignée d’actrices à s’imposer dans le genre de l’action. Elle partage le trône avec Scarlett Johansson. Muse de Woody Allen, elle devenue l’ambassadrice du cinéma hollywoodien d’action en incarnant Lucy pour Luc Besson, la Veuve Noire pour Marvel et le cyborg Motoko Kusanagi dans le remake décrié de Ghost in the Shell au printemps. Avant elle, Angelina Jolie a connu de beaux succès avec deux Tomb Raiders (2001-2003), Wanted (2008) et Salt (2010). Noomi Rapace, la star de la trilogie Millenium, s’est illustrée dans les actionners Dead Man Down (2013) et Conspiracy (2017). Zoe Saldana incarne le rôle principal féminin dans trois sagas très lucratives de SF, Avatar (2009), Gardiens de la Galaxie (2013-2017) et Star Trek (2009-2016), tout en jouant dans des productions Luc Besson comme Colombiana (2011).

Elles ne sont pas les seules: Milla Jovovich a porté avec brio la saga Resident Evil (2002-2017); Gal Galdot vient d’obtenir un triomphe dans Wonder Women de Patty Jenkins; Sofia Boutella a été une tueuse aux jambes aussi tranchantes que des katanas dans Kingsman (2015), une extraterrestre à l’agilité redoutable dans Star Trek: Sans limites (2016) et la momie dans le film du même nom (2017). Sans oublier Daisy Ridley, le nouveau visage de Star Wars. Et Michelle Rodriguez, qui a récemment poussé un coup de gueule pour que les personnages féminins de Fast and Furious soient mieux représentés.

De Hollywood à Hong Kong

Bien entendu, le 7e Art n’a pas attendu les années 2000 et Charlize Theron pour mettre en scène des femmes dans des films d’action. Ridley Scott l’a compris dès 1978 en plaçant Ellen Ripley alias Sigourney Weaver au centre d’Alien. James Cameron lui a emboîté le pas avec Terminator (1984), puis Terminator 2: Le Jugement dernier (1991) où Sarah Connor alias Linda Hamilton occupe une place importante. Dans Nikita (1990), Luc Besson a suivi l'exemple de ses cousins d'Amérique. Malgré ces rôles cultes, ce type d’opportunité restaient rares pour les femmes dans les années 1980, alors que Chuck Norris, Sylvester Stallone, Schwarzie ou encore Kurt Russell triomphaient au box office.

A la même époque, à Hong Kong, l'autre berceau du cinéma d’action mondial, la situation est peu ou prou similaire. Le succès retentissant de Bruce Lee engendre dans la colonie britannique un regain des figures viriles et dominatrices: Jackie Chan, Samo Hung, Jet Li, Chow Yun Fat...

Une actrice parvient malgré tout à s’imposer dans ce milieu très masculin: Michelle Yeoh, la future Shu Lien de Tigre et Dragon (2000) d’Ang Lee. Dans les polars Yes, Madam (1985) et Royal Warriors (1986), sorte d’Inspecteur Harry au féminin, elle démontre une maîtrise impressionnante des arts martiaux et des armes à feu. Elle joue aussi bien dans des thrillers que dans des films d’épée, comme Tai-chi Master (1993) avec Jet Li, Tigre et dragon et plus récemment Le Règne des assassins (2010).

Son succès réactive la tradition des dames d’épées, très prisées par le cinéma chinois dans les années 1950 et 1960. Au Japon, cette tradition est aussi vivace. Des séries comme La Femme Scorpion (1972-1977) ou Lady Snowblood (1972-1973) rencontrent le succès dans les années 1970. Histoire d’une femme guerrière hors paire qui cherche à venger la mort de sa mère, Lady Snowblood inspirera Kill Bill (2003-2004). Malgré les échecs, à la même période, d'Æon Flux, d'Elektra avec Jennifer Garner et de Catwoman avec Halle Berry, le succès du film de Tarantino a su relancer le goût d’Hollywood pour des histoires d’action avec des femmes. 

Jérôme Lachasse