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Yann Moix: ses anciens dessins publiés dans une revue antisémite refont surface, il s'explique

Yann Moix

Yann Moix - François Lo Presti - AFP

L'Express exhume des caricatures publiées par Yann Moix dans une publication indépendante antisémite, il y a une trentaine d'années. Des dessins qui lui donnent "envie de vomir" aujourd'hui, comme il l'explique.

En pleine guerre avec sa famille autour des violences qu'il aurait ou non subies dans son enfance, Yann Moix fait face à une nouvelle polémique. L'Express dévoile ce lundi de vieux dessins antisémites publiés par l'écrivain dans une revue indépendante lorsqu'il était étudiant. Il fait son mea culpa, tente de donner des éléments d'explication, et en profite pour jeter la pierre à son petit-frère.

L'ancienne revue, dont L'Express fait état de trois numéros, est baptisée Ushoahiah, le magazine de l'extrême. Sur la couverture du premier numéro, dessinée par Yann Moix, on peut voir un déporté jouer de la guitare électrique; à côté de lui, un pommeau de douche marqué de croix gammées, des flammes, et dans le fond un amoncellement de cadavres.

L'Express évoque également un dessin de Bernard Henri-Lévy en déporté accompagné de la légende "Le véritable rêve de BHL: devenir un héros d'Auschwitz" ainsi qu'une autre illustration de déporté "au long nez et aux oreilles décollées", selon l'hebdomadaire, accompagnée des quelques mots "Club Mickey-Auschwitz".

"Je rêvais de placer mes dessins dans Hara-Kiri"

L'Express multiplie les exemple et évoque des textes violemment antisémites et négationnistes, qui s'en prennent à Bernard Henri-Lévy, Marek Halter ou encore André Glucksmann. Yann Moix nie être à l'origine des écrits, mais reconnaît que les dessins sont les siens.

"L'homme de cinquante ans que je suis est littéralement épouvanté de ce qu'il a pu produire, en l'espèce, à 21 ans", déclare l'auteur à L'Express. Il évoque son ambition d'alors de travailler comme dessinateur pour des revues sulfureuses:

"J'ai effectivement participé, durant l'année universitaire 1989-90, à l'âge de 21 ans, en tant que dessinateur, à ces trois numéros. J'étais à l'époque étudiant en école de commerce et je m'ennuyais. Je rêvais, alors, de placer mes dessins dans Hara-Kiri."

Admirateur de Vuillemin, l'auteur d'un album intitulé Hitler = SS, il décide de pousser les curseurs et de dessiner des caricatures toujours plus noires, avec pour objectif de les envoyer au directeur d'Hara-Kiri, le professeur Choron:

"Ce que je n'ai jamais fait, ne croyant sans doute pas en mes chances d'être publié. J'ai donc recyclé ces dessins (...) dans un journal de potache, Ushoahia."

"Je souhaitais simplement choquer"

"Je me suis strictement borné à faire les dessins. Je n'ai participé à aucun texte", insiste-t-il, et se défend de tout antisémitisme, même à l'époque: "Je souhaitais simplement, par le choix de sujets tabous, comme la Shoah, les myopathes, l'abbé Pierre ou la faim dans le monde, choquer les gens qui me liraient. Je me fichais alors du sujet." Et de rappeler: "Depuis quinze ans, je me passionne pour le sujet. J'ai appris l'hébreu, étudié le Talmud.

Yann Moix, dans cette interview, fait part du dégoût que lui inspirent aujourd'hui ses propres dessins:

"J'étais, en voici la preuve, un jeune de 21 ans bien lamentable... Mais aussi pitoyable (...) En repensant à ces pages vieilles de plus de trente ans qui sont exhumées aujourd'hui, j'ai non seulement envie de vomir, mais de vomir le jeune homme de vingt ans que j'étais."

Il assure que Bernard-Henri Lévy, qui l'a aidé à lancer sa carrière, et Olivier Nora, patron de sa maison d'édition Grasset, étaient tous les deux au courant.

"Mon frère a toujours été une balance"

Il s'agit du dernier épisode d'une rentrée littéraire particulièrement compliquée pour Yann Moix. Dans Orléans, son dernier ouvrage, il raconte une enfance marquée par les coups d'un père tyrannique, en écho à la sienne. Mais José Moix, son père, se défend dans la presse d'avoir battu son fils. Il assure que Yann Moix était lui-même extrêmement violent avec son petit-frère, Alexandre. Une version corroborée par ce dernier dans les pages du Parisien

Yann Moix profite de l'exhumation de ces dessins pour tacler son petit-frère, qui "le menace depuis des années avec ce 'trésor de guerre', comme il l'appelle". "Je savais qu'(il) finirait par contacter des journalistes pour leur refiler ces pages", déclare-t-il (propos dont L'Express "laisse la responsabilité" à Yann Moix):

"Mon frère a toujours été une balance. Mon père me frappait à coups de poing et de fil électrique sur une seule remarque, un seul caprice, une seule plainte émanant de lui. Il a toujours tout raté, a toujours souhaité être moi (...) Avec ces dessins qui sortent aujourd'hui, il tire son ultime cartouche. Cet aveu d'échec est d'une grande tristesse."
Benjamin Pierret