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Une "Duduchothèque" et deux livres pour rendre hommage à Cabu

Cabu en 2011

Cabu en 2011 - Miguel Medina / AFP

Deux livres dressent le portrait du co-fondateur de Charlie Hebdo, tandis que sa ville natale inaugure un espace culturel où sont exposées ses œuvres de jeunesse.

Les hommages à Cabu se multiplient. Le journaliste Jean-Luc Porquet, un de ses proches, a publié en octobre Cabu, une Vie de dessinateurDu Grand Duduche au Beauf en passant par son amour du jazz, cette copieuse biographique du co-fondateur de Hara-Kiri et Charlie Hebdo réunit croquis et photos rares. Une plongée inédite dans les archives d'un grand auteur du 9e Art.

Pour compléter cette lecture, un espace culturel surnommé "Duduchotèque" sera inauguré ce samedi 1er décembre à Châlons-en-Champagne (Marne), la ville où il est né en 1938 et où il a été enterré après sa mort en 2015 dans l'attentat de Charlie Hebdo

"La Duduchotèque, ce n'était pas le nom que j'avais choisi", a déclaré jeudi 29 novembre sur RTL la veuve du dessinateur, Véronique Cabut. "J'avais parlé au début d''Espace Cabu' et les journalistes du Canard enchaîné m'ont dit 'mais Véronique t'es ridicule, 'Espace Cabu' ça ne marche pas. Tu devrais suggérer à Benoist Apparu - le maire de Châlons - 'la Duduchotèque''. Donc c'est la 'Duduchotèque'."

80 dessins exposés

Une exposition, intitulée "K-bu avant Cabu. Tout commence à Châlons", sera visible du 1er décembre au 1er avril. Le co-commissaire Jean-François Pitet s'est plongé dans l'œuvre "foisonnante et prolixe" du dessinateur, dont il était proche. "Cabu dessinait beaucoup, gardait tout et ne rangeait rien", s'amuse-t-il en montrant les cartes postales, feuilles volantes et autres cahiers parcourus de dessins de jeunesse, désormais versés au fonds de la ville.

Les curés, les militaires, les courses cyclistes, la famille, la drague au parc du Jard: "il a énormément dessiné à Châlons, il y a fait l'apprentissage de son métier, c'était un laboratoire avec toutes les strates de la société", rappelle Jean-François Pitet. Du lycée au bistrot, Cabu se servira de la vie châlonnaise pour créer plusieurs personnages emblématiques, à l'image du Grand Duduche ou du Beauf, et gardera ce lien indéfectible avec sa ville natale, où il est enterré.

"Il s'est fait connaître en signant ses dessins K-bu... Il exposait ses caricatures chez le père Gilbert, un coiffeur qui avait beaucoup d'humour", avant de se faire repérer par un journaliste de l'Union qui lui ouvre les portes du quotidien local. Les 80 dessins exposés, datant de 1948 à 1960, retracent ses influences, ses thématiques de prédilection, ses premiers pas dans le journal de son lycée, ses préoccupations adolescentes et l'évolution de son trait... L'affirmation d'un style, qui lui ouvrira les portes des journaux parisiens, du Pèlerin à Hara-Kiri.

Cabu dessiné par Luz
Cabu dessiné par Luz © Luz Futuropolis 2018

Luz rend hommage à Cabu

En octobre, Luz a lui aussi rendu hommage à son maître dans Indélébiles, joyeux récit de ses vingt-trois années passées dans la rédaction de l’hebdomadaire satirique. L'auteur de Catharsis y raconte notamment sa première rencontre avec Cabu.

Luz le dessine debout, sans ses lunettes, en train de rire. Un moment privilégié survenu le jour de son arrivée à Paris et qui marque le début de son aventure avec l'équipe de Charlie Hebdo: "À travers ce dessin, je raconte comment ma vie a commencé", expliquait Luz à BFMTV.com début novembre. "C’est bizarre de dire ça, mais c’est à ce moment-là que Luz est né. Avant, il n’existe pas. En fait, je suis beaucoup plus jeune que je le crois!"

Luz a tout appris au contact de Cabu. "On avait beaucoup de conversations sur le dessin", se souvient-il. "Avec Cabu, on se demandait souvent si une caricature devait être ressemblante ou juste. Une fois, on s’est tellement fritté là-dessus qu'on s’est fait la tête pendant deux jours!". Le dessiner dans Indélébiles n'a pas été facile, mais cela lui a servi de catharsis et l'a aidé à démarrer le projet: "C’est hyper agréable de dessiner Cabu. Tu fais le nez, les cheveux… c’est top."

Au-delà du dessinateur de génie, capable de croquer n'importe quelle célébrité, Luz garde le souvenir d'un visionnaire, méfiant assez rapidement de la numérisation de la presse: "Il avait peur de la dématérialisation du métier. Ce qui est en cours et a commencé avec les journaux gratuits: 20 minutes, Métro. Lui voyait ça comme les fossoyeurs de la presse. Il avait raison. C'était la première dématérialisation. On a enlevé le coût, donc la valeur. Il était très précurseur dans son analyse..."

Indélébiles, Luz, Futuropolis, 320 pages, 24 euros.

Cabu, une vie de dessinateur, Jean-Luc Porquet, Gallimard, 384 pages, 39 euros.

Jérôme Lachasse avec AFP