Dans les coulisses de la nouvelle exposition de Nikos Aliagas, photographe au regard bienveillant
Il y a le sourire de son père, les mains de JoeyStarr, le visage ridé d'une femme grecque... L'univers de Nikos Aliagas est là, exposé à la Conciergerie du 24 mars au 22 mai, un lieu chargé d'histoire, dont les voûtes gothiques ont abrité les derniers soupirs de Marie-Antoinette. Pas tout à fait celui que l'on imagine pour l'animateur de The Voice. Plutôt ses moments de respiration. Des voyages, des rencontres avec des personnalités et des anonymes. Les très grands tirages semblent jaillir de la pénombre, par la grâce d'une scénographie très réussie.
Nikos Aliagas porte un regard bienveillant sur ses contemporains un peu partout dans le monde. De Cuba à l'Ile Maurice, en passant par la ville grecque de Missolonghi, patrie de ses parents.
"J'aime bien la mélancolie des gens"
L'animateur de 50 minutes inside, raconte avec verve l'histoire de chaque cliché, des personnages qu'ils a photographiés, leur rencontre. Récits tendres émaillés d'anecdotes. Nikos Aliagas, photographe autodidacte, ne cache pas son admiration pour les photographes humanistes.
Le Brésilien Sebastio Salgado, mais aussi Joseph Koudelka, ou l'Américain William Klein, qui a su "déghettoïser certaines tranches de la société". Cette admiration est palpable sur certains clichés, comme celui des mains de JoeyStarr. "On la voit, la vie de JoeyStarr, elle est là (il désigne les tatouages). Et en même temps, il se tient comme un gamin", relève-t-il.
"Quand je photographie des gens célèbres, je n'essaie pas de les faire plus stars qu'ils ne sont, mais de les faire plus humains qu'ils ne sont". Ce qu'il veut montrer, ce sont "leurs paradoxes, leur solitude, leur mélancolie. J'aime bien la mélancolie des gens". Sous un discours parfois un peu trop bien huilé sur la photographie, affleure une empathie véritable.
"Je ne sortais pas mon appareil"
"Quand j'ai vu une star ou un artiste qui avait le visage qui ne correspondait pas à l'image qu'on avait de lui, je ne sortais pas mon appareil".
Avec les inconnus, c'est la même chose, assure-t-il. "La femme qui est très ridée, je pourrais la rendre un peu plus "freak" (ndlr: monstre). Mais je veux la rendre douce, montrer qu'elle porte sa vie sur son visage".
"La dialectique du gars de la télé"
Cette exposition, c'est aussi une façon de montrer autre chose de lui-même. Quelqu'un de plus profond que l'animateur télé qui divertit. Touché par les souffrances d'autrui, il se dit "ému aux larmes" par ces vieux pêcheurs de Lesbos, qui ont tout perdu avec la crise, et n'hésitent pas à plonger "pour sauver un gamin" migrant.
"Je ne peux pas être seulement dans la posture de l'animateur. J'aime mon métier, qui me passionne. Mais photographier me permet de marquer une pause, de ne pas être dans la dialectique du gars de la télé, d'essayer de raconter une autre histoire. Par un besoin presque impérieux de dire 'je suis concerné aussi par ce que je vois'".
Pour autant, il ne partage pas toutes ses photos, parce qu'il connaît le pouvoir de l'image et ne se sent pas légitime pour tout montrer. Il s'imagine facilement être interpelé: "'Qui tu es pour photographier un SDF?', je les entends. Qui a la légitimité de prendre des photos?".
"J'ai eu 26 millions de vues"
S'il se réclame des grands reporters humanistes, il ne se prétend pas photographe. Sa notoriété, il l'a acquise sur les réseaux sociaux. C'est sur Instagram et Flickr, qu'il s'est d'abord frotté au regard du public. "J'ai eu 26 millions de vues dans le monde", évoque-t-il.
Surpris et ravi d'avoir été contacté pour une interview, par Yahoo! USA, qui le pensait photographe de métier, Nikos Aliagas confie: "Quand j'ai fait ces photos, je ne savais pas que j'allais les exposer, mais dans ma tête je devais être sérieux. J'avais une responsabilité presque éthique".
Nikos Aliagas prépare déjà une autre exposition sur les Grecs, intitulée: "Proud people of Greece". Pour documenter la disparition d'une Grèce qui lui est si chère.
"corps & âmes"
Du 24 mars au 22 mai 2016
Conciergerie, 2, boulevard du palais, 75001 Paris
9h30 - 18h
Plein tarif: 8,50
Tarif réduit: 6,50