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Nicolas Bedos explique pourquoi il a défendu Fanny Ardant, "très heureuse" pour Roman Polanski

Nicolas Bedos à la 27e cérémonie des Molières, en avril 2015

Nicolas Bedos à la 27e cérémonie des Molières, en avril 2015 - Thomas Samson - AFP

Dans un entretien accordé au Parisien, l'acteur et réalisateur revient sur les polémiques liées aux César 2020, et réagit au départ d'Adèle Haenel.

"Je ne l'ai fait ni contre Adèle Haenel ni pour Polanski". Dans un entretien accordé au Parisien, Nicolas Bedos revient sur les polémiques liées aux César 2020, lors desquels il a remporté trois prix. Il y évoque notamment la comédienne Fanny Ardant, qu'il a soutenue lorsqu'elle a pris la défense du réalisateur Roman Polanski, accusé de viols, et récompensé lors de la cérémonie. " J'aime beaucoup, beaucoup, Roman Polanski, donc je suis très heureuse pour lui", avait-elle assuré ce soir-là. 

"Dans cette broyeuse de nuances que constitue notre époque, la réaction de Fanny a pu être perçue comme de l'indifférence à la souffrance des victimes, alors que Fanny est beaucoup plus complexe et sensible que cela", estime Nicolas Bedos. "Interrogée à chaud, elle a refusé d'accabler davantage un metteur en scène auquel elle est liée depuis des décennies".

"C'est son droit, son rapport intime à l'amitié et je n'ai pas à le juger. Je l'ai défendue parce que je sais sa noblesse d'âme", ajoute-t-il.

"L'opinion publique, la vraie, fait le tri"

Nicolas Bedos explique que sa démarche à lui n'était "ni contre Adèle Haenel ni pour Polanski". "J'ai lu des centaines de tweets orduriers uniquement parce que je n'ai pas désavoué l'actrice de mon film. On se retrouve sur des listes noires - comme aux pires périodes de l'Histoire", dénonce-t-il.

L'acteur et réalisateur regrette que "cette période, bien que nécessaire, nourrisse de telles passions qu'elle ne tolère aucune nuance et aucun paradoxe".

"Elle est par ailleurs un extraordinaire révélateur de lâchetés et d'opportunismes individuels: on voit surgir des frondeurs de la dernière heure, chacun protégeant sa petite boutique sur les réseaux sociaux. L'opinion publique, la vraie, fait le tri", assure-t-il. 

"On peut être Adèle et Charlie"

Interrogé sur le départ de l'actrice Adèle Haenel, qui a quitté la salle en criant "La honte!" lorsque Polanski a été sacré meilleur réalisateur, Nicolas Bedos dit comprendre cette réaction.

"Comment rester sourd au cri du cœur d'Adèle Haenel qui a perçu l'attribution de ce prix comme une insulte à sa douleur? Je la comprends", affirme-t-il. Il ne croit pas pour autant "qu'une majorité de votants aient voulu banaliser les crimes d'agressions sexuelles".

"Cet extraordinaire mouvement de révolte mérite une vaste réflexion de fond", poursuit-il. "Car un autre danger nous menace, celui que l'indignation légitime des oppressé(e)s rentre en collision avec un autre combat qui nous a tous soulevés le cœur en janvier 2015: la liberté d'expression artistique et le refus de la moralisation de l'art. On peut être Adèle ET Charlie".

"J'espère de tout mon cœur que ces nobles causes, dans leur élan vertueux, ne piétineront pas au passage d'autres acquis majeurs tels que la présomption d'innocence, la liberté d'expression et le respect de la justice, au profit de la présomption de culpabilité et d'une justice médiatique dont on sait les outrances", conclut-il.
Nawal Bonnefoy