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Mort du grand reporter Jacques Abouchar, ex-otage en Afghanistan

Le grand reporter Jacques Abouchar, en 1984.

Le grand reporter Jacques Abouchar, en 1984. - Capture d'écran - Ina.fr

L'ancien grand reporter, otage en Afghanistan en 1984, s'est éteint à l'âge de 87 ans.

Jacques Abouchar, ancien grand reporter et rédacteur en chef à Antenne 2, connu pour avoir été détenu 40 jours à Kaboul en 1984, condamné à 18 ans de prison puis gracié, s'est éteint lundi à l'âge de 87 ans, a annoncé sa famille.

Le journaliste, qui vivait à Biarritz, est mort à Bayonne, ont précisé ses proches.

Né le 1er février 1931, Jacques Abouchar, diplômé du Centre de formation des journalistes, était entré à la fin des années 1950 à la Radio-Télévision Française (RTF, ancêtre de l'ORTF), après plusieurs expériences dans la presse, notamment à l'Agence France-Presse et à Reuters.

Liban et Côte d'Ivoire

Il avait travaillé notamment au Liban et en Côte d'Ivoire et était devenu grand reporter au sein de l'ORTF. C'est à ce titre qu'il avait intégré Antenne 2 (devenue France 2) en 1975, lors de la création de la chaîne. En 1981, il devient rédacteur en chef adjoint du journal du soir, A2 Dernière, puis rejoint le service étranger.

C'est en 1984 que son nom fait la une des journaux français : il est capturé en Afghanistan par les forces soviéto-afghanes dans la nuit du 17 au 18 septembre, alors qu'il venait d'entrer clandestinement dans ce pays, dans la province de Kandahar (sud) avec une équipe d'Antenne 2, pour y tourner un reportage.

Otage du régime afghan

A l'époque, il est considéré par beaucoup comme l'otage du régime afghan, soutenu par l'URSS, dans un pays en proie depuis 1979 à un conflit avec les moudjahidines, soutenus eux-mêmes par les Etats-Unis, le tout sur fond de guerre froide. 

Sans atteindre la médiatisation que connaîtront les journalistes français enlevés l'année suivante au Liban, sa capture suscita une vive émotion et des condamnations en France ainsi qu'à l'étranger. Son comité de soutien, qui revendiquait 50.000 adhésions, avait organisé une manifestation pour sa libération qui avait rassemblé deux mille personnes à Paris le 18 octobre.

Le gouvernement français s'était fortement mobilisé et avait activé ses réseaux diplomatiques pour le faire libérer, et même le PCF, tout en condamnant son entrée illégale sur le territoire afghan, avait fait pression sur son homologue afghan pour obtenir son retour.

Condamné à 18 ans de prison le 20 octobre, pour "passage clandestin de la frontière" et "collaboration avec des éléments contre-révolutionnaires" en vue de "recueillir des informations hostiles" aux autorités, Jacques Abouchar est finalement gracié par le gouvernement afghan, 5 jours après sa condamnation, et libéré après 40 jours de détention.

Agents soviétiques

Le premier ministre Laurent Fabius l'avait accueilli en personne à son retour en France, le 27 octobre, retransmis en direct sur sa chaîne, Antenne 2.

Il avait témoigné que les moments les plus difficiles avaient été son arrestation, lors d'une embuscade impliquant des chars soviétiques, et ses quinze premiers jours de détention. Tout en disant avoir été traité "très correctement", il avait expliqué que des agents soviétiques, le soupçonnant d'espionnage, voulaient le pousser à s'avouer complice de la CIA.

Avant lui, un autre Français, Philippe Augoyard, médecin en mission humanitaire, avait été fait prisonnier et condamné à huit ans de prison en 1983, pour entrée illégale sur le territoire afghan et pour avoir "collaboré avec des éléments contre-révolutionnaires".

Jacques Abouchar, qui avait poursuivi sa carrière après son retour en France, avait reçu en novembre 1984 le prix de grand reportage "Pierre Mille", pour "l'ensemble de ses reportages et pour la dignité des compte-rendus qu'il a donnés de sa capture et de sa détention en Afghanistan".

Le grand reporter avait raconté sa captivité dans un ouvrage paru en 1985 chez Balland: Dans la cage de l'Ours.

M.R. avec AFP