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Ibrahim Maalouf: "Le concert avec Sting au Bataclan m'a permis de faire mon deuil personnel"

Ibrahim Maalouf à Cannes en 2016

Ibrahim Maalouf à Cannes en 2016 - Valery Hache - AFP

A quelques heures de monter sur scène à l'AccorHôtels Arena de Paris, le musicien se confie à BFMTV.com, évoque les différents hommages aux victimes des attentats de Paris auxquels il a participé et parle de ses projets futurs, fait d’albums et d’un peu de repos.

Dernier show pour Ibrahim Maalouf. Le musicien de 36 ans clôture ce soir, une longue tournée avec un concert intitulé 10 ans de Live, à l'AccorHôtels Arena, face à 20.000 personnes. L’occasion pour lui, de faire un bilan. Rencontre avec un artiste qui popularise la musique classique en s'inspirant de sa culture d'origine.

Vous avez composé la musique de Un automne à Paris, titre chanté par Louane en hommage aux victimes des attentats. Comment s’est monté ce projet? 

J’ai été contacté par la ministre Najat Vallaud-Belkacem. Elle voulait marquer les esprits et rendre hommage aux victimes des attentats de Paris. Un hommage qui permet de faire le deuil et de stimuler l’espoir. 

Vous avez tout de suite accepté? 

J’ai d’abord réfléchi, pour savoir si j’avais les épaules. J’ai fait une proposition: je voulais que ça soit relayé dans les écoles de France pour que les enfants la chantent. L'Éducation nationale était d’accord et voulait elle aussi, que ce projet aille en ce sens. J’ai donc fait appel à mon oncle parce que je trouvais que la démarche familiale était primordiale dans ce genre de situation. J’ai ensuite demandé à Louane de chanter, parce qu’elle représente la jeunesse.

Vous étiez également sur scène avec Sting pour la réouverture du Bataclan, le mois dernier...

Oui, il est venu me chercher. Cela fait un moment qu’il me propose de venir colorer sa musique. Je devais faire une tournée avec lui, mais cela n’avait finalement pas pu se faire à cause de nos emplois du temps respectifs.

"Je ne me sens porte-parole de rien"

Comment est-ce qu’on se sent en montant sur scène à ce moment-là? 

Ce sont des émotions paradoxales, c’est assez flou. J’y suis allé parce que Sting me l'a demandé. Je n’aurais pas eu autant de facilité si ça n’avait pas été lui. Ca m’a permis de faire mon deuil personnel. Je suis ressorti remué de ce concert hommage, mais Sting dégage une bonne énergie positive. Je pense que beaucoup sont repartis apaisés et avec le sourire.

Vous considérez-vous comme un porte-parole?

Je ne sens porte-parole de rien. Je ne me cache pas. Je ne vais pas faire comme Eric Zemmour qui transforme son nom. Heureusement que la France nous a accueillis. Je suis un Arabe d'origine, un Libanais de culture et un Français. Je ne le nie pas et n'en fais pas non plus mon cheval de bataille.

 "Je suis trop touché par les critiques, je ne les écoute pas"

Êtes-vous un artiste qui fait des compromis? 

Non, je refuse. Quand je vois ou que j’entends des critiques, je suis trop touché, ça me perturbe donc je n’écoute pas. Un de mes profs de musique classique m’avait dit: "Tu ne joueras jamais de la musique classique comme nous, Français, parce que tu viens du Liban". J’ai cherché à le faire démentir en passant des concours internationaux. J’ai remporté un concours où il était jury… Ca a été ma revanche. 

Vous avez été nommé aux Césars 2015 pour la meilleure musique originale avec le film Yves Saint Laurent. Courrez-vous après les récompenses? 

Pas vraiment. Ce n’est pas si important d‘un point de vue artistique, mais malheureusement sans ça, je ne pourrais pas faire ce métier. Les professionnels m’ont apporté une crédibilité, tandis que la reconnaissance du public me permet de vivre correctement et de proposer de projets. 

"Je travaille actuellement sur un cinquième album"

Vous serez-ce soir à Bercy pour fêter vos "10 ans de Live". Les 20.000 places se sont vendues très rapidement il y a plusieurs mois. Depuis Miles Davis, en 1984, c’est la première fois qu’un musicien de Jazz remplit la plus grande salle de France. Vous appréhendez ce moment? 

C’est vrai, mais, contrairement à moi, Miles Davis n’était pas seul sur scène: il la partageait avec Bobby McFerrin. J’appréhende certes, mais dans le bon sens. Je n’ai pas peur, malgré la responsabilité que j’ai de représenter le milieu du jazz. 

Ce concert signe également la fin de votre tournée… 

Oui, mais je n’arrête pas pour autant de travailler. Il y aura quelques dates plus tard. Mais ce rythme-là n’est pas vivable: on ne voit pas la famille, on mange mal (rires), on est fatigués et cela fait 10 ans que je le fais. Il est temps de me reposer un peu. 

Quels sont vos projets? On dit que quatre nouveaux albums sont déjà enregistrés et que vous ne savez pas lequel sortir en premier…

C’est vrai! Je vais même vous dire quelque chose: je travaille actuellement sur un cinquième album! (rires). Ils sortiront tous, mais je ne veux pas me presser, je veux faire les choses bien et faire des choix qui me ressemblent.