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Cinéma

Dans les coulisses du film de zombies parisiens La Nuit a dévoré le monde

La Nuit a dévoré le monde

La Nuit a dévoré le monde - Copyright Laurent Champoussin

A l'occasion du festival parisien Les Monteurs s'affichent, la monteuse Isabelle Manquillet raconte son expérience sur cet atypique film de zombies français et le film de guerre Ni le ciel ni la terre.

Donner sa chance à des films passés inaperçus tout en comprenant comment ils sont fabriqués: tel est l'objectif du festival Les Monteurs s'affichent, organisé à l'Hôtel de ville de Paris du 14 au 18 mars.

Les spectateurs auront notamment l'occasion de (re)découvrir samedi 17 mars à 20h au cinéma le Luminor (20 Rue du Temple à Paris) Ni le ciel ni la terre, audacieux premier film de Clément Cogitore avec Jérémie Renier et Swann Arlaud, qui vient de recevoir le César du meilleur acteur pour Petit Paysan.

Présenté en 2015 au Festival de Cannes, ce film de guerre à la frontière du fantastique n'avait pas rencontré le succès qu'il méritait, malgré les louanges de la presse. Situé en Afghanistan, Ni le ciel ni la terre raconte la mystérieuse disparition de soldats français affectés à une mission de contrôle et de surveillance dans une vallée reculée et frontalière du Pakistan.

Monteuse de ce film, Isabelle Manquillet participe à l'association des Monteurs Associés, à l'origine du festival. Son actualité est chargée en ce mois de mars: elle est aussi à l'affiche de La Nuit à dévoré le monde de Dominique Rocher, audacieux film de genre français où un homme se retranche dans un immeuble haussmannien après une épidémie de zombies. 

Monter un film de genre

La Nuit a dévoré le monde sort au cinéma ce mercredi 7 mars et a reçu des critiques élogieuses pour sa représentation inédite des zombies. "C'est un film de zombies, mais aussi la trajectoire d'un homme seul", rectifie Isabelle Manquillet. Elle ajoute: "Dans le montage, on sent d'ailleurs rapidement que la trajectoire sera psychologique et pas uniquement fondée sur la confrontation avec les zombies". 

Le film comporte, comme dans les films de George A. Romero (La Nuit des morts-vivants, Zombie), son lot d'hémoglobine. Certains plans d'une cervelle éclatée par un tir de chevrotine viennent troubler la tranquillité du récit (et la monotonie du quotidien du personnage principal). Il n'y a pas de recettes pour choisir la durée d'un plan comme celui-ci, estime Isabelle Manquillet: "On réajuste souvent les durées de plan selon ce qui précède ou suit", raconte-t-elle.

Dans un film de genre, plus que les plans gores, c'est l'atmosphère qui compte. Celle de La Nuit a dévoré le monde est pesante, rythmée par les solos de batterie du personnage principal. Les bruits sont rares. Isabelle Manquillet préfère monter sans la musique, pour mieux ressentir là où elle est indispensable: "Il faut attendre que le film se trouve avant d'ajouter la musique, mais il est important d'avoir les sons dans les films de genre pour les mettre très tôt", indique-t-elle.

Monteuse, une aide précieuse sur les scénarios

Entre le cinéaste et la monteuse, le travail commence souvent en amont. Notamment lorsqu'il s'agit d'un premier film, comme c'est le cas pour Ni le ciel ni la terre et La Nuit a dévoré le monde: 

"Les réalisateurs ont besoin de faire tout le cheminement avec le monteur", confirme Isabelle Manquillet. "Sur un second film, la mécanique est différente. J'ai travaillé sur L'Heure de la sortie de Sébastien Marnier avec Laurent Laffite. J'ai monté pendant le tournage. Souvent, on me consulte avant le tournage sur le scénario, car on a le regard avisé sur la mise en place d'une narration et la trajectoire des personnages. Quand c'est mal ficelé, on le sent tout de suite et on sait qu'on va le retrouver au montage".

Ce n'était pas le cas sur le scénario de Clément Cogitore pour Ni le ciel ni la terre. Sa maîtrise du sujet était totale, comme le confirme sa monteuse:

"Clément est quelqu'un qui ne va pas lâcher son scénario tant qu'il ne sera pas solide comme du béton sur la trajectoire des personnages et la narration. C'est essentiel pour lui de travailler sa narration au plus haut point avant de partir au tournage. Et il a bien fait: c'était un premier long, il n'y avait pas beaucoup d'argent et les conditions de tournage dans le désert d'Ouarzazate étaient difficiles. Au montage, on n'a pas eu de problème de structure. On a allégé certaines scènes, mais la structure était forte". 

Selon Isabelle Manquillet, le montage consiste à se glisser dans l'univers du cinéaste et à essayer d'en donner la meilleure version possible. Lors de la 3e édition des Monteurs s'affichent, elle évoquera ses questions tout en permettant de redonner sa chance à Ni le ciel ni la terre, excellent film victime de la surproduction du cinéma. Espérons un meilleur destin à La Nuit a dévoré le monde
affiche du festival
affiche du festival © Les Monteurs s'affichent
Jérôme Lachasse